Silence

Musique

Les sons qui accompagnent le léger cliquetis du clavier sur lequel j’écris sortent des haut parleurs, percutent et se répercutent sur les murs du studio, spatialisent mon lieu de travail. Un espace ( ? ) se crée.

Silence

Tout autour de moi redevient ce qu’il n’a jamais cessé d’être : un espace. Un autre espace, plus petit.

Musique

L’espace ne se limite plus à l’espace matériel du studio. Le monde s’ouvre, je suis là et ailleurs, pas dans l’ailleurs des connotations musicales, je ne serais plus là, je suis là et ailleurs ( ? ).

Chacune des notes s’annonce dans la note qui la précède, puis, là, elle s’appuie sur le bruit du frigo, du clavier, pour s’imposer dans son silence, celui qu’elle crée autour d’elle préparant la venue de la suivante qui déjà l’attendait et dans laquelle elle reste présente.

Le temps affiché au coin bas-droit de l’écran, ce temps du papier à musique, celui de mon espace cubique n’est plus tout a fait synchrone.

Le temps de l’autre « espace », ce (non) espace ouvert par le rythme né du silence de mes bruits, est un temps qui, dans la mesure, ne peut se mesurer, qui s’étire et se contracte.

Derrière le piano de Carla Bley[1] un métronome sur-enchérit sur le silence que le piano crée à chaque frappe, la musique n’en est que plus présente, les cliquetis de mon clavier et le moteur du frigo interfèrent, prennent un corps que je ne leur connaissais pas, ils se font monde et déploient à leur tour leur silence environnant.

Silence

Mon cœur bat dans mes veines, mes doigts glissent sur le clavier … un instant je me vois/sens, un instant court, toujours trop court, je suis là et ailleurs.

Un instant dans le silence de l’autre monde je me tiens hors de moi.  …à me regarder dans cet instant je le perds, je me perds …

Musique …

Un instant, je suis présent.



[1] Carla BLEY, Musique mécanique, Carla Bley & Steeve Swallow - Duets, musique Carla Bley, A Watt Production,  Watt/29 547 297-2,  1998.